Est bien dirigé celui que Dieu dirige; et celui que Dieu égare on ne saurait lui trouver ni patron, ni guide.

Sommaire

El Morchid
El 'Imara
La vie
Le hanif
Les Trois Piliers
"Pir" Inayat Khan
 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Documents

Pir Inayat Khan

El Morchid n°31/Novembre 1949

Le "Pir" Cheikh Inayat Khan

   1882-192

 

C'est le "Pir" Cheikh Inayat Khan qui de l'Inde, fut le premier à présenter le Soufisme au monde Occidental. Pour réaliser ce but il a fondé une grande école qui existe jusqu'à ce jour. Inayat Khan était Musulman et de parents Perses.

   Avant de recevoir le commandement spirituel d'introduire le Soufisme vers l'Ouest il reçut l'initiation de quatre grandes écoles Soufi de l'Inde: Nakshabandia, Chistia, Kadria et d'une autre dont le nom m'échappe. Il est à retenir de tous les Cheikhs qu'il rencontra pour son initiation , ces derniers: Sayed Mohamed Abu Madani de Heyderabad et de Hassan Nazami.

 

    Déjà enfant son destin est bien déterminé: " Un jour dans sa ville de Baroda,  des garçons jouaient au bord de l'étang; et au bord de l'eau il y avait plusieurs idoles Hindous;  les enfants qui étaient Musulmans n'avaient pas de respect pour les dieux sacrés des Hindous,  s'amusaient à sauter dessus.

-Ne faites pas ça! dit Inayat.

-Pourquoi non? répondirent les autres, elles ne sont pas notre Dieu!

-Non, elles ne sont pas notre Dieu; riposta Inayat mais elles sont les Dieux des autres. 

   Lorsque le moment fut venu, beaucoup plus tard, de former les principes de l'organisation du mouvement Soufi en Occident, il le basa sur ce principal point, pour réaliser et diffuser la connaissance de l'Unité: la religion d'Amour et de sagesse, ainsi le biais des Fois et des croyances tombera. Le coeur de l'homme débordera avec l'Amour et alors toutes la haine  que les distinctions et les oppositions occasionnent disparaîtront d'elles-mêmes.

   C'est à Baroda que Inayat  enfant apprit un autre principe qui devint plus tard le centre de son enseignement. Dans la profonde Inde mystérieuse, avec les Yogis et les Sages se développe la tendance de "Vairagya" : vie de solitude et d'ascétisme dans les forêts et les caves; cette tendance était fortifiée par la nature très mystique et très spirituelle. Mais chez Inayat  son grand principe soufi, à son sens, était que la voie de l'ascétisme est sans valeur, et que la vie dominante se trouve être dans ce monde et cependant au dessus du monde. Il réalisa que celui qui pense profondément à la vie et assiste son frère est davantage dans la voie réelle que celui qui habite la forêt et pense à lui-même. Que la beauté de l'existence est dans l'expression de l'amour envers l'homme, dans son service, dans l'union avec lui et non pas en quittant le monde pour se cacher dans une cave. Qu'en effet le monde est créé pour un but, et que ce but à réaliser est de vivre pour toutes les créatures en les aimant, ainsi on vit pour Dieu en L'aimant.

   La première connaissance en la Vérité lui vint un soir. L'enfant Inayat fait la prière sur la terrasse de sa demeure, lors qu'il pense que jusqu'à ce jour il n'avait pas de réponse à ses prières et qu'il ne connaissait pas le Dieu, ne savait pas où Il était. Ne pouvant continuer ainsi il s'en fut trouver son père:

   -Je crois que je ne continuerais pas les prières, dit-il, car ce n'est pas raisonnable de prier un Dieu qu'on ne connaît pas.

   Le père heureux de la pensée de son jeune fils pour connaître la Vérité, lui fit une réponse soufi car il était un "Mourid Allah":

   -Le Dieu est en vous, et vous êtes en Dieu, comme la bulle est à l'Océan. La bulle n'est pas séparé de l'Océan. Pour un instant elle est apparue comme bulle, mais retournera d'où elle est venue. Ainsi est la relation entre l'homme et Dieu.

   Dieu dit dans le Coran, qu'il est plus près de vous que l'artère carotide. Cela signifie en vérité que votre corps est plus loin de vous que l'est Allah. Que Dieu est la vraie profondeur de vous même.

   Dès cet instant Inayat consacra sa vie entière à examiner et à chercher, ce en quoi il a connu et a cru en cette seule et grande vérité.

   A dix-huit ans il était un musicien habile et un croyant profond dans la mission mystique de la musique. Il a fait le grand tour de l'Inde et a gagné une connaissance et un succès auprès des foules et des Rajahs. Il vécut un long temps avec un maître soufi, un descendant direct du Prophète, un homme qui vivait une vie simple et sage, le Cheikh Sayed Mohammed Abu Madani.

   Il commença son travail d'élévation par la musique. Sur son instrument "Vina" il présenta des "Samaâ" de mystiques. D'abord aux Indes, ensuite en Europe, enfin en Amérique, il réalise l'importance, la nécessité de présenter la voie soufi au Monde Occidental.

   L'Inde  l'honora au titre le plus élevé de "Tansen": c'est-à-dire le chanteur mystique de la cour de l'empereur Akbar dans les temps anciens.

   Un jour Akbar dit à Tansen, après avoir entendu un chant qui lui plut beaucoup:

-Vous chantez toujours admirablement bien, où avez-vous appris cet adorable chant?

-Je le tiens de mon Maître, répondit Tansen.

-Où est-il votre Maître?

-Il habite loin d'ici, je ne sais où.

-Oh! vous chantez merveilleusement bien, continue l'empereur. Votre Maître peut-il chanter aussi bien que vous?

-Comme chanteur mon Maître est si grand que je ne peux mentionner son nom.

   Très intéressé Akbar insiste.

-Je voudrais bien l'écouter chanter, voulez-vous que nous allions le chercher?

-Oui, mais j'ai peur qu'il ne veuille pas chanter devant l'Empereur, si nous le trouvons.

-Alors, dit Akbar , je vous accompagnerais comme serviteur.

-Ainsi, c'est possible, répondit Tansen.

   Par intuition, ils trouvèrent très loin dans la montagne le sage musicien en méditation. Celui-ci connut par la voie de son âme, que par humilité le roi est venu en domestique et cela lui plut beaucoup.

   Le Maître chanta, Akbar et Tansen se perdirent en félicité Divine. Au retour en eux-même, ils ne virent plus le Maître.

-Où est-il? demanda Akbar

-Il est sorti, il ne reviendra pas.

   Ils revinrent au palais.

   Un jour l'Empereur appela Tansen et lui parla:

-J'ai la nostalgie et le grand besoin d'écouter votre Maître chanter encore.

-C'est impossible de le rechercher maintenant.

-Mais, supplie le roi, j'ai le désir ardent, une grande inquiétude, je veux écouter cette voix encore. Savez-vous la "Raga" qu'il chante?

-Oui.

-Voulez-vous chanter? Je vous en prie.

   Tansen chanta.

-Oui c'est la même "Raga" mais elle ne vibre pas des mêmes accents. Pourquoi?

-C'est parce que je chante devant vous, Empereur, et que mon Maître chante devant Dieu.

   Tansen partit, il quitta l'Empereur et la cour. Comme son Maître il s'en fut chanter à Dieu.

   Une fois un "Guru" (maître mystique) lui a demandé ce qu'il pensait de la réincarnation, car il n'avait jamais trouvé son enseignement chez les Soufis. Il a ajouté qu'il ne pouvait pas comprendre que les grands maîtres Soufis aient négligé cette idée. Est-ce que les Soufis ont la croyance de la réincarnation?

-Oui les Soufis connaissent le problème, répondit Inayat Khan , mais il ne les intéresse pas. Le travail principal du Soufi est de nier sa personnalité limitée, et l'affirmation de l'existence seule de Dieu. Avec cela l'ego faux s'évanouit, et le vrai ego, le Divin en l'homme s'élève et se découvre. En ce but est le premier objectif de la création, je pense, ajouta-t-il que ce qui est passé et connu, n'a pas de grande valeur. Que ce qui viendra et inconnu, est un tourment pas très nécessaire pour le présent. Mais ce moment ci est très important, et s'il est vécu comme il faut. A quoi bon désirer autre chose? Chez les Hindous, a continué Inayat Khan , la croyance en la réincarnation prévaut et cependant le principe le plus grand du "Védanta", de qui toutes les croyances différentes des Indes dérivent est "Adwaïta" ou "pas de dualité" en un mot "Unité".

   Alors, conclue Inayat Khan , permettez que je demande, quel est  l'enseignement le meilleur du principe du "Védanta": le pensant à la doctrine de réincarnation, ou le désintéressement?

   Inayat est venu aux Etats-Unis en 1910, pour accomplir sa mission  de révéler à ceux qui cherchent  la Vérité, la Voie Soufi.

   Ces premiers buts étaient:

1°/ D'établir une confrérie d'hommes sans considération de caste, de credo, de race, de nation ou de religion, car les différences ne créent pas non seulement la discorde, mais elles sont la source de toutes les  misères.

2°/ Diffuser la connaissance Soufi au monde de l'Ouest qui lui était cachée et qui en réalité est la propriété de tous les hommes et non une  particularité propre à une race ou à une religion.

3°/ Assister les hommes en les gagnant vers la perfection et en quoi le mysticisme n'est plus un mystère, mais il rachète l'incrédule de l'ignorance et évite au croyant de tomber, victime de l'hypocrisie.

3°/ Harmoniser l'Est et l'Ouest , par l'échange de connaissance, et créer une renaissance vers l'Unité.

4°/Diffuser, intéresser la lecture Soufi, presque inconnue, et pourtant très belle et très instructive en Vérité sur tous les aspects de la connaissance.

   Voyageant de nation en nation, parlant et donnant l'enseignement, il a établi en 1923  une organisation très grande dont le centre  international  se plaça à Genève (Suisse). On lui demandait souvent: "Quel est la différence entre les Soufis et les autres religions ? " et à lui de répondre : "La différence est , que le Soufi rejette toute différence".

   Ayant exprimé sa conception sur les relations des Prophètes ( Que la grâce de Dieu soit sur eux) une dame se plaignit un jour des idées du Cheikh.

-Je crois, dit la dame, que Jésus est le fils de Dieu et notre sauveur, et qu'il faut enseigner sa religion au monde païen. Maintenant je comprends que vous considériez que tous les Prophètes soient égaux.

-Je n'ai jamais dit que tous les Prophètes soient égaux, je dis que je ne me considère pas comme leur égal pour les juger, suivant la parole de Jésus:" Ne jugez point". Ainsi tout simplement j'incline ma tête en toute humilité.

   L'enseignement le plus puissant fut peut-être exprimé par sa parole à la radio de New York à deux millions de personnes la nuit de Noël 1925:

"Quel enseignement donner aux générations futures?" dit-il.

L'anoblissement de l'âme, la largesse d'esprit sur la vie, l'élévation de conscience.

Et que deviendront-elles?

Pas des ascètes, pas des orthodoxes, pas des bigots de religion, mais des âmes de conscience de la confrérie des hommes, qui oeuvrera pour le plaisir ou le déplaisir de Dieu, non pour le plaisir ou le déplaisir de l'homme.

Leur lutte , à ces âmes, ne sera pas la lutte pour le trésor du monde.

Leurs mentalités penseront, leurs coeurs sentiront , leurs âmes verront la vie de l'intérieur et la vie de l'extérieur.

Seront-ils les peuples du monde, seront-elles les âmes célestes? Ils seront les deux.

Ils donneront au monde ce qu'il faut donner au monde, et donneront à Dieu ce qu'il faut donner à Dieu.

Il faut que le jour vienne où les suivants des religions différentes, comme les Chrétiens, les Musulmans, les Hindous, les Juifs, sentent en eux la place de la prière des autres, comme dans leur temple. Disant à l'égal du Soufi:

"Une église, un temple, ou une pierre de la Kaâba, le Coran, la Bible ou l'os d'un martyr. Tous cela et plus encore, mon coeur peut tolérer. Depuis que ma religion, maintenant n'est que l'Amour."

  Après avoir donné avec succès le message Soufi au monde occidental, Inayat Khan s'en fut finir ses derniers jours à Delhi.

  Pendant les deux derniers jours, écrit un ami, il était inconscient du monde d'ici, il ne parlait plus, mais sa belle figure était illuminée.

   Le corps est enterré près du tombeau du grand saint Soufi: Chisti Nizam-U-Din Oulia.

   On dit que pendant les dernières heures  de Inayat Khan , la chambre était envahie d'un parfum de roses invisibles. Sans doute, était-ce les roses du jardins de Sa'di: "pétales que la main rude de l'automne ne peut affecter, et la légèreté de son printemps éternel, que nulle révolution de saison ne peut changer".

   Ce sont les symboles pour nous d'une douceur d'âme jamais surpassée et d'un courage splendide qui force à l'admiration.

   "Tout disparaît quand la pensée du bien-aimé 

                                               occupe l'âme de l'amoureux

     Le bien-aimé est tout en tous, l'amoureux 

                                               n'est plus qu'un voile pour Lui

     Le bien-aimé est tout ce qui vit, 

                                               l'amoureux n'est qu'une chose morte".

 T.REINDOLLAR

 

© adlania 2003.  Toute reproduction sans accord préalable est interdite

Ce site est hébergé par Free.fr