El
Morchid
n°22/Septembre
1948
Les
Trois Piliers de la Religion
La religion musulmane se repose sur
trois parties: l'Islam, l'Iman, l'Ihsane. Chacune d'elle a
son sens en elle-même. L'Islam : c'est la soumission à Dieu de tout notre être, de tous nos sens, de tous nos organes: les
mains, les pieds, les yeux, la langue, l'estomac et les organes
sexuels. C'est la soumission de la vie intérieure de chacun de
nous. L'Islam , c'est l'homme esclave de son Créateur,
acceptant son esclavage. " Si les hommes y étaient entrés,
ils n'en seraient jamais sortis, l'obéissance n'est dure que
lorsqu'il s'agit du bien" Mais l'Islam est doux pour celui qui
aime le bien, il n'apporte que joie et satisfaction, en se
soumettant à Dieu on devient fort de la force de Dieu.
L' Islam comporte cinq obligations qui en sont les bases
fondamentales. Elles se déterminent ainsi: Les deux attestations,
la prière, la dîme, le jeûne et le pèlerinage à la Mecque.
L'Imane c'est le sentiment qui vient du cœur et réside
en lui , c'est la Foi. C'est la certitude de la grandeur et
de la puissance de Dieu. L'Imane : c'est la croyance
en Dieu Seul , Unique et sans associé. Le cœur doit
croire à Son existence, à Lui toutes les
perfections. Il existe en nous et autour de nous. Il est
en toute chose. Il est en tout être. Il est Vrai, Il est le créateur.
Il n'est le père de personne.
Et personne n'est son fils. Il entend . Il voit tout.
Rien ne Lui est comparable. L'Imane: c'est la croyance
aux anges, aux Livres révélés : depuis la Thora jusqu'au Coran
en passant par les Psaumes et L'Évangile; aux Prophètes
depuis Adam jusqu'à Mohammed ; au jugement dernier ;
enfin à la Prédestination.
Lorsqu'on pratique bien L'Islam et L'Imane on reçoit
le résultat de ce travail qui se révèle par L'Ihsane. Pour
être plus explicite nous allons prendre en exemple une action
primordiale dans la vie matérielle: " Le repas".
Ainsi on prépare un repas, on le mange, et le résultat c'est la
force du sang. Certaines gens croient que puisque la force du sang
est ce qui résulte du travail de préparation et de manger du
repas, il est plus simple de boire directement le sang afin d'éviter
tous les ennuis et les obligations qui s'imposent. Seuls les gens
raisonnables savent bien que le sang lui-même n'est pas
nourrissant, mais que c'est vraiment le repas qui l'est.
Ainsi font ceux qui vont à L'Ihsane sans pratiquer L'Islam et L'Imane. Ces gens sont tombés dans l'erreur parce
qu'ils ont voulu être à la spiritualité de Jésus, le suivre en
sa connaissance ésotérique sans pratiquer ni les enseignements de
la Thora ou du Coran.
Sidna Issa ( que le salut soit sur lui) est le Prophète
foncièrement spirituel qui eut l'Evangile-Spiritualité elle-même.
C'est la raison pour laquelle dans ses enseignements aux apôtres, Jésus
demande de suivre la Thora , parce qu'elle est la Loi de
Dieu. Il ne demandait pas de suivre sa Loi, il n'en apportait pas,
parce qu'il était tout l'esprit spirituel de la Loi Céleste.
Celui qui veut atteindre la Connaissance dans la voie de Jésus et
qui ne suit pas la règle de la Thora ou du Coran est semblable à
celui qui veut tout-à-coup nager dans la grande mer sans ceinture
de sauvetage ou sans bateau à côté de lui. Nous n'avons pas
besoin d'insister sur les dangers d'une telle expérience.
Si un instant il résiste, sa situation est très mauvaise par le
fait que la mer est changeante, parfois très mauvaise,
compromettant en plus l'expérience. Il est si naturel de suivre les
voies normales de la vie d'apprentissage, d'apprendre à nager sur
les bords peu profonds ou de ne s'aventurer que suivi d'une barque.
Jésus est un amiral dans l'océan spirituel, et malgré cela il se
tient en haute mer sur son bateau. Il vit sans cesse par les plus
hauts fonds. Il mange de la mer. Il dort de mer. Il parle de mer. Il
boit de la mer. Il s'enivre de la mer. Il est amoureux de la mer.
Comme à un navigateur si vous lui demandiez ce qu'il est ; il vous
répondrait : je suis la mer, parce qu'il ne peut jamais se passer
de son parfum, de ses caresses. Même à terre le vrai marin se sent
épris de la mer, il ne peut passer un instant sans la voir. Que de
vieux loups de mer sont morts de nostalgie dans le pays breton,
parce qu'ils ne naviguaient plus.
Jésus nageait dans les flots immenses de l'infini. Il est fou
d'amour pour ces immensités, puis au fond ce n'est pas exactement
cela, il n'est pas fou de Dieu, car il est lui-même l'amour de
Dieu, il se grise de son propre amour, la mer se grise de son
parfum, tout comme si vous prenez une algue marine, vous la sentez
et vous dites: " elle a le parfum de la mer" ensuite la
bise vous amène un parfum identique et vous dites " la mer a
l'odeur de l'algue".
Jésus
vivait, sentait, aimait, empreint d'elle jusqu'à être elle.
Il était la mer Divine. C'est ainsi qu'on lui demandait: où
vas-tu? je vais à Dieu répondait-il; d'où viens-tu? je viens de
Dieu. De quoi te nourris-tu? je me nourris de Dieu, je bois de Dieu,
je dors de Dieu, et, dans son ivresse spirituelle: Je suis Dieu.
Il est plein de mer, tout suinte la mer divine. C'est son état
particulier et nul ne peut s'aventurer dans ces parages. C'est une
chose de Dieu. Nous disons donc que celui qui veut nager dans
la pleine connaissance, il lui faut aussi son bateau, sa ceinture de
sauvetage, s'il ne veut pas couler. Le bateau de Jésus, c'était l'Évangile,
mais le bateau de l'école nautique c'était la Thora.
Nier cela, c'est être dans l'erreur toute pure, hélas nous voyons
beaucoup de personnes, bien instruites, bien élevées, enfin une élite
qui malgré toute son instruction est prise par cette erreur. Elle
tente de vivre en haute mer sans passer par le bateau école. Elle
cherche les plus hauts degrés spirituels sans ceinture de
sauvetage. Se croyant de grands nageurs ces gens se lancent dans
l'océan infini, pour nous, nous craignons qu'un jour ils coulent à
pic perdant pied en n'ayant aucun secours, aucun appui.
Voila pourquoi la religion musulmane se repose sur trois parties.
Les deux premières de ces parties ; c'est le bord , le rivage ou
bien le bateau école: Islam-Iman . La troisième c'est le
savoir, le résultat, la navigation c'est être marin: L'Ihsane
. La spiritualité c'est comme la lumière électrique, on ne peut
la voir que dans l'ampoule, dans se qui reçoit la lumière. Nous
savons très bien qu'elle est dans les fils. Qu'elle marche en eux,
mais on ne la voit pas. Il n'y a que l'ampoule qui nous la révèle.
Mais encore faut-il que cette ampoule ne soit pas grillée ni cassée,
et il reste malgré tout à la placer sur le courant qui lui
convient. On risque de la griller soi-même si on la place sur la
force tandis qu'elle doit être branchée sur la lumière.
Voyez-vous en tout cela, il est plus simple et plus garanti de faire
exécuter l'installation par l'électricien de métier. Malgré
qu'il existe des livres où tous les métiers sont expliqués
jusqu'aux plus petits faits, malgré que nous en soyons bien
instruits nous
ne pouvons prétendre réaliser un travail aussi parfait, aussi vrai
que celui de l'ouvrier de métier, votre travail laissera toujours
à désirer.
Certes nous pouvons
arriver à faire l'installation, mais cela est très dangereux, très
dangereux, nous sommes plus près de la catastrophe. Oui les livres
peuvent donner toutes les explications, mais quant à la pratique
c'est à l'ouvrier qu'il faut en référer. Même si on arrive à
connaître le Livre par coeur, le réciter sans à coups, il manque
la direction technique.
... Il n'y a pas de
science sans Maître.
Cheikh Adda BENTOUNES.